J’entends d’ici vos cris de surprise… moi non plus, je ne pensais pas qu’il y aurait vraiment une suite à cette série, mais force est de constater que ce débat ne s’éteint jamais et ça m’a toujours démangé d’écrire sur le sujet. Vous l’aurez compris au titre, nous allons parler de boy’s love, un terme qui englobe toutes les histoires de relations amoureuses et/ou sexuelles entre personnages masculins… un genre extrêmement populaire et connu pour être écrit par des femmes, pour des femmes.
On pourrait être tenté de parler de féminisme, car il s’agit de femmes qui ont créé leur propre espace. C’est une façon, autant pour les autrices que pour les lectrices, d’explorer leur sexualité, leur rapport au corps, à l’abris du male gaze. Sur internet, on va trouver beaucoup de gens qui défendent cette idée et nombre d’articles et études l’appuient.
Mais on a également un autre camp, qui prend tout autant de place dans la discussion, qui considère que cette libération se fait au détriment des hommes gays, fétichisés par ces oeuvres qui mettent en scène des schémas relationnels parfois toxiques, véhiculant des idées homophobes, et souvent éloignés de leur réalité.
Pendant des années et des années, quand j’étais encore au collège/lycée, j’étais plutôt de cet avis-là. Si on ne creuse pas trop, c’est facile de réduire tout ce débat au fait que le boy’s love fait de l’ombre aux concernés qui, dans une société encore homophobe et très hétéronormée, ont encore du mal à faire publier leur propre histoire, tandis que des femmes a priori hétéros les traitent comme des fantasmes et se font de l’argent là-dessus. J’ai même un article qui part de ce principe. J’y pose la question suivante : est-ce que le BL et, par extension, toutes ces oeuvres destinés au public féminin qui se servent d’un sous-texte homoérotique pour vendre, peuvent être considérés comme de la représentation LGBT+ ? ou est-ce simplement de l’exploitation ?
Je ne l’ai jamais supprimé parce que, de toute évidence, il attire encore du monde et je pense qu’il pose quand même quelques questions intéressantes, mais mon avis a quand même beaucoup évolué depuis. Déjà, je me prends beaucoup moins la tête… mais je me considère aussi un peu plus renseignée sur la question et je vais profiter de cet article pour partager le fruit de mes réflexions avec vous.
Un peu d’histoire
J’ai eu l’occasion de le mentionner quelques fois mais, durant ma licence, j’ai rédigé un mémoire de taille bien modeste sur la revue Takarazuka et le travestissement chez les femmes japonaises. Si le sujet vous intéresse, j’ai un article qui précède mon travail de recherche qui traite aussi du sujet.
J’y analyse notamment pourquoi la revue, exclusivement féminine, a eu autant de succès auprès des jeunes femmes mais aussi comment elle a inspiré le shôjo manga, en particulier l’oeuvre de Tezuka. En 1953, il sort Princesse Saphir, considéré comme un des premiers manga du genre et dont les éléments visuels s’inspirent de la revue Takarazuka. Son héroïne a deux coeurs : celui d’une femme, et celui d’un homme. Elle est basée sur les actrices « otokoyaku », qui incarnent les rôles masculins.
Est-ce que le nom « CLOCKUP » vous dit quelque chose ? C’est un développeur d’eroge, erotic games, jeux pornographiques, vous voyez le genre. L’entreprise est à l’origine de chef-d’œuvres, tels que euphoria, Ero Manga! H mo Manga mo Step-up ♪, ou encore Please R❤pe Me!. En 2013, CLOCKUP veut élargir ses horizons et faire ses premiers pas dans le très profitable marché du ~boys love~, et ainsi est né la société sœur « parade », et avec elle, leur premier « BL game »: NO, THANK YOU!!!. Et qu’est-ce que ça donne quand un développeur spécialisé dans les jeux 18+ pour mecs hétéros touche au « yaoi » ?
Le résultat est à mi-chemin entre l’eroge pour public masculin et le jeu BL pour public féminin, à la frontière du nukige. Avec parade, le but de CLOCKUP est de s’attirer un nouveau public féminin, les fameuses « fujoshi », mais il n’oublie pas pour autant son public initial et le résultat est un visual novel s’adressant quand même fortement aux hommes. C’est un peu dans la même optique que Mangagamer l’a licencié en 2015: proposer quelque chose pour un éventuel public féminin amateur d’histoires homoérotiques, tout en s’assurant que leur public de base, masculin, puisse quand même y trouver son compte.
Voilà pour vous donner une idée de quel genre de jeu c’est. Dans le même genre, vous êtes peut-être plus familiers avec le titre Hadaka Shitsuji (qui, d’ailleurs, sortira aussi chez Mangagamer très prochainement).
Un BL qui prend en compte le « male gaze » a donc ses particularités par rapport à un BL « classique ».
Déjà, à l’instant, je disais que c’était à la frontière du nukige. Parce que contrairement à ce qu’on pourrait croire, les eroge ont beau être à contenu pornographique, il y a quand même une histoire, et les scènes de sexe y sont, croyez-le ou non, secondaires. Dans certains jeux, on peut même les zapper ! Alors que les visual novels dit « nukige », le scénario passe au second plan, tout l’intérêt est d’avoir de quoi se masturber. No, Thank You!!!, qu’on va commencer par abréger NTY, a quand même une histoire, qui n’est pas là juste pour faire joli, mais le sexe est très présent; chaque route a autour de 8 scènes de sexe. Et on ne tourne pas autour du pot. Qui plus est, c’est très graphique, et détaillé, explicite.
Le protagoniste est d’ailleurs hypersexuel, son but est de s’envoyer en l’air, et le plus possible. Aussi, c’est un « top », il prend toujours l’initiative, ce qu’on constate très rarement chez les protagonistes de BL « classiques ».
Les personnages sont loin des « bisounen » qu’on voit d’habitude, ils sont plus baraqués, poilus, et âgés. Le style se rapproche davantage du manga gay (« bara », terme qui, bien que désuet, vous parle peut-être plus) que du boys love.
Que de sexe sans sentiments, pas de romance ici. Pas mal de rapports non consentants aussi, et je sais que le BL n’y est pas étranger mais dans ce jeu c’est très récurrent, et ça va parfois jusqu’au viol, on sent bien l’influence des eroge.
J’aurais l’occasion de revenir sur certains points au cours de cet article, mais avant ça… j’ai dit qu’il y avait une histoire, il serait peut-être temps d’en parler!
On incarne un dénommé Haru. Evidemment, il est amnésique.
En sauvant un type qui allait se faire écraser, il perd la mémoire. Reconnaissant, celui qu’il a sauvé, Inui Kouichi, paye ses frais d’hospitalisation, et, en attendant qu’il se souvienne de qui il est et d’où il vient, lui offre un logement et un job dans le bar dont il est propriétaire. Mais « sotano » n’est pas un simple bar, c’est aussi une agence de détective privé…
Le jeu est divisé en 5 chapitres, chacun consacré à une enquête différente. Chose que vous devriez savoir avant de jouer: le ton est léger, mais les thèmes abordés sont très sombres. Stalker, trafic de stupéfiants et snuffs movies, maltraitance d’enfants, prostitution, inceste, maltraitance d’enfants, et j’en passe.
Il y a 4 routes, avec chacune deux « bad ends » et une « true end ». Et la spécificité de NTY, c’est que, oui, vous êtes présentés à des choix à différents moments du jeu, mais ce qui influe vraiment le cours de l’histoire, c’est si oui ou non vous appuyez sur le bouton « NO, THANK YOU!!! ».
Avant de commencer à jouer, je ne comprenais pas trop le concept, donc je vais l’expliquer du mieux que je peux. En gros: de temps à autres, ce bouton, dont le jeu tient son nom, apparaîtra à gauche au haut de votre écran. Vous devrez alors analyser la situation et comprendre ce à quoi vous pouvez, ou non, dire « non, merci!!! », et selon si vous utilisez ou ignorez le bouton, l’histoire changera. (Faites toujours une sauvegarde avant de prendre votre décision, c’est parfois dur de savoir à quoi elle mènera.)
Et si déjà on parle du système, voilà d’autres options intéressantes:
Notons que le NTY a au-delà de 3000 CGs ! Mais on y compte les nombreuses variations d’un même CG, et il faut aussi préciser que c’est quasiment que des scènes de cul, y’a très peu de CGs en dehors de ça (quand je vous dit que ça se rapproche du nukige…). Au moins, vous n’y verrez aucune mosaïque: le jeu est censuré au Japon, mais pas dans la version de Mangagamer !
Enfin, tous les personnages sont entièrement doublés, même les plus insignifiants ! On a même la possibilité d’enregistrer nos lignes préférées dans « voice collection ». Alors ça… j’en ai bien profité pour sauvegarder toutes les meilleures répliques du jeu……
Mais revenons à l’histoire, parce que c’est bien beau tout ça mais on ne sait toujours pas ce que le jeu vaut!
Le scénario est correct. Rien de transcendant dans l’écriture, mais j’ai trouvé qu’on ne s’ennuyait pas, que tout s’enchaînait assez bien,… Deux choses m’ont particulièrement plu. La première, c’est qu’il y a quand même un peu de réalisme à toutes ces situations: ça ne se termine pas toujours bien, et parfois il faut prendre la décision la plus dure dans l’intérêt de ceux qu’on veut aider. L’autre, c’est qu’après être arrivé à la fin de notre premier route, on redécouvre l’histoire.
Déjà, quand on approche de la fin, le ton, jusqu’alors humoristique et léger, change radicalement, et devient beaucoup plus sérieux. On en apprend un peu plus sur Haru et sa véritable identité. Le retournement de situation est assez surprenant à la fin de la première route ! Et l’atmosphère des suivantes est complètement différente maintenant qu’on en sait un peu plus sur Haru et ses intentions. A chaque nouvelles routes, on apprend de nouvelles informations et le mystère autour des personnages se lève. Ca évite que ça soit trop répétitif, et en plus, on a l’option de skip le texte déjà lu dans d’autres routes; comme ça, on avance plus vite et on est sûr de rien rater en y allant trop vite avec le bouton skip.
Donc j’ai apprécié que l’histoire ait plus à offrir que ce qu’elle laisse paraître au premier abord. Bon, je vous cache pas que ça valait pas forcément le coup, l’histoire n’est pas spécialement bien ficelée, ni très bien construite, mais hé, j’apprécie le twist.
Voilà maintenant une semaine que j’ai publié l’article intitulé « Est-ce que Yuri!!! on Ice pourrait, mais surtout /devrait/ être plus gay ? ». L’anime n’a pas perdu de temps pour répondre à toutes les questions que j’y posais, alors entre temps, je l’ai mis à jour, pour dire que j’étais optimiste concernant la suite, mais je ne pouvais pas m’empêcher d’exprimer ma réticence face à l’officialisation de cette relation. Pour moi, le problème majeur, c’est le public ciblé par cet anime: les fujoshi. Beaucoup n’ont pas compris comment j’en étais arrivé à la conclusion que cet anime visait un tel public.
J’imagine que la confusion vient de la connotation du terme « fujoshi »: par définition, il désigne les filles fans de boys love, les romances entre deux hommes, écrites par des femmes pour d’autres femmes (généralement hétéros). Alors quand je dis « anime pour fujoshi », c’est vrai que ça pourrait impliquer tout anime avec ce fameux sous-texte homoérotique dont on a déjà tant parlé, voire carrément un anime « yaoi ». Mais pas forcément ! Parce que de plus en plus, le mot « fujoshi » est utilisée comme un équivalent féminin d’ « otaku ».
Donc quand on parle d’anime pour « otaku », on entend anime avec du fanservice à base de lolis, corps aux proportions irréalistes, seins qui défient les lois de la physique et overdose de moe. C’est fait pour plaire à un public masculin bien particulier, un public de niche.
Et les anime dits pour « fujoshi », c’est la même chose, mais fait dans l’esprit de plaire avant tout à un public féminin, encore une fois un public de niche: beaux gosses qui font du sport, beaux gosses dans un groupe d’idols, reverse-harem, et tout ce qui s’en suit.
Au final, peu importe votre genre, vous pouvez aimer n’importe quel type d’anime, mais la réalité des choses, c’est que lorsqu’un studio produit un anime, c’est dans le but de faire du profit, et la solution de facilité, c’est souvent de s’adresser à un public dévoué, c’est à dire des fans qui seront prêts à acheter n’importe quel produit dérivés, et bien sûr, les DVDs. Et au Japon, on distingue bien deux types de consommateurs, deux communautés qui ont chacune des fantasmes bien précis: d’un côté, ceux qui veulent du moe (souvent des hommes), et de l’autre, ceux qui veulent des bishounen (souvent des femmes). Voilà comment se sont dessinées les deux catégories « otaku » et « fujoshi ». L’une trouve sa place dans les rues d’Akihabara et l’autre arpente Otome Road à Ikebukuro.
Si vous n’avez pas lu mon article sur le coût d’un anime, c’est le moment ou jamais!, ça apporte un peu de contexte:
En plus de parler des dépenses qu’engendre la production d’un anime, j’explique que contrairement à ce qu’on pourrait croire par chez nous, un anime est rarement « tout public ». Les anime qui marchent le mieux sont ceux qui sont diffusés durant la journée, et c’est des anime « pour toute la famille », des petites productions courtes comme Sazae-san ou Doreamon. Le reste passe généralement après 23h. Même les titres « josei », « shounen »,… qui font aussi dans le marketing genré mais s’adressent un public déjà un petit peu plus large (pas forcément « otaku ») ne sont pas « mainstream » au Japon. Pour qu’un anime rapporte gros, l’idéal serait qu’il rencontre un large succès à l’international, comme Shingeki no Kyojin a su le faire.
Tout ça pour dire qu’une bonne stratégie pour amasser du fric et rentabiliser une production, c’est savoir parler au bon public, et lui donner ce qu’il veut.
Depuis… disons 2010… le marché de l’anime s’est rendu compte que les filles aussi pouvaient dépenser des sommes folles dans leurs séries préférées, et c’est comme ça qu’on a commencé à voir de plus en plus d’anime qui leur été destinés. Mais encore une fois, on parle bien de « fujoshi », d' »otaku », des fans très impliquées et dévouées. Au final, des anime « pour les filles » qui ne s’adressent pas à cette catégorie bien spécifiques de fans, y’en a de moins en moins…
Ore Monogatari!! visait les jeunes filles, Shouwa Genroku Rakugo Shinjuu ciblait un public féminin plus mature,…
Il y aussi des titres qui sont un peu « entre les deux »; je pense à Haikyuu!! ou encore Kuroko no Basuke, qui sont, à la base, des manga publiés dans le Weekly Shounen Jump. Tout est dans le titre: c’est littéralement un magazine qui s’adresse aux jeunes garçons. C’est pas pour autant qu’il a renoncé à s’attirer un lectorat féminin.
Les statistiques de Nikkei Shimbun en 2012 montrent les séries populaires auprès des filles, et celles qui plaisent davantage aux garçons.
Haikyuu!!, Gintama, Reborn, Kuroko no Basket,… on a lectorat largement féminin, tandis que chez les garçons, on lit plutôt Nisekoi, Kochikame, Medaka Box, Toriko et Beelzebub.
Comme leur nom l’implique, c’est vrai que les fujoshi sont souvent de grandes amatrices de Boys Love ! ça n’aura échappé à personnes. Du coup, pour leur plaire sans pour autant faire un anime explicitement « BL », les studios n’hésitent à insister lourdement sur le sous-texte homoérotique. C’est pas systématiquement le cas: y’a rien de tout ça dans Osomatsu-san, ni dans Uta no Prince-sama (ce qui n’empêche pas les fans de se laisser aller à leur fantaisies; les doujinshi le prouvent bien, et sont là pour ça). Mais c’est très récurrent. On l’a vu dans Free!, mais aussi dans Days, Binan Koukou Chikyuu Boueibu Love!,…
Revenons-en maintenant à Yuri!!! on Ice: très clairement, l’anime appartient à la catégorie « fujoshi », et c’était clair dès le début. Ces dernières années, les anime de sport sont devenus très populaire auprès des fans d’anime: tout a commencé avec Prince of Tennis, puis on a eu Haikyuu!!, Kuroko, Yowamushi Pedal, Ace of Diamond, Free!,… et Yuri!!! on Ice s’est naturellement ajouté à la liste. Si l’omniprésence des beaux gosses ne suffit pas à vous convaincre:
– l’anime est diffusé à 2h21 du mat au Japon, donc clairement, c’est pas un anime tout public
– sa promotion est faite dans des magazines destinés à un lectorat féminin, comme Pash! ou Spoon.2Di
– l’anime a pris d’assaut les magasins Animate, ainsi que la convention Animate Girls Festival: l’Animate est une chaîne de magasins qui s’adressent avant tout à une clientèle féminine.
Juste quelques exemples qui suffisent à identifier qui est la cible de Yuri!!! on Ice…
Et les anime comme ça, je les adore. D’ailleurs, à la seconde même où Yuri!!! on Ice a été annoncé, alors qu’on n’avait même pas encore de visuel, j’étais déjà fan. Aussi, je sais pas si vous avez remarqué mais… je suis fan de Free!. Et sur ce blog, c’est principalement le type d’anime dont je parle. Je l’ai d’ailleurs nommé « Otome Street » ! Mais je fais aussi partie de la communauté LGBTQ+, et je me soucie de sa représentation dans les médias.
Donc quand ces anime exploitent les relations homosexuelles pour le fanservice, ça me fait grincer des dents.
Pour moi, tout l’intérêt de la représentation, c’est d’offrir de la visibilité aux personnes LGBTQ+. On ne s’en rend pas toujours compte quand on est largement représenté dans les médias, mais c’est très important de pouvoir se reconnaître dans des personnages, de pouvoir s’y identifier et d’avoir des figures qui nous ressemblent. Ca aide à s’accepter, voire à se comprendre, et ça fait juste beaucoup de bien. Ca permet aussi de normaliser certaines choses, de permettre aux minorités d’être mieux acceptées et comprises par les autres. C’est pour ça qu’il faut plus de personnages LGBTQ+ dans les médias « mainstream » qui touchent un large public, mais aussi plus de personnages féminins!!, de personnes racisées, non-valides,…
Quand un anime comme Yuri!!! on Ice montre un couple gay… je suis contente, j’ai envie d’être optimiste, et c’est d’ailleurs ce que j’ai dit dans mon article: je pense que c’est un pas en avant. Mais je ne peux pas ignorer… pour qui est cet anime. C’est pour les filles. Les fans d’anime. Fans qui sont friandes de relations homosexuelles. C’est du fétichisme, de mon point de vue. Et dans tous les cas, c’est pas de la « représentation », ou du moins elle n’est pas efficace.
J’adore Victuri, c’est une relation fantastique, et pour la première fois, j’ai pas été « queerbait ». Mais ça reste dirigé à un public féminin. C’est pas pour les personnes LGBTQ+, c’est chouette mais loin d’être aussi progressiste que Tumblr veut bien le croire. Au Japon, ça ne contribue pas à la cause LGBTQ+, ça n’aide pas les hommes gays, et d’ailleurs, la plupart ne regardent pas cet anime, peu de gens le regardent en dehors des fangirls. Donc j’en reviens à cette crainte: est-ce que ça vaut vraiment le coup ?
Après, l’anime est diffusé en simulcast à l’étranger grâce à Crunchyroll; alors je veux bien croire que certaines personnes, dans nos contrées, puissent se sentir « représentées », peut-être que ça a quand même un impact positif, mais… le tout dans le tout, je suis pas convaincue. Je ne pense pas que ça va faire avancer grand chose. Et le fandom autour est majoritairement composée de jeunes filles, jeunes femmes, qui pour la plupart fétichisent ce genre de relations. Le marketing autour de l’anime exploite ça. Donc…
Mais peut-être suis-je trop pessimiste, peut-être que le Boys Love, et les anime comme Yuri!!! on Ice, peuvent jouer en la faveur de la cause LGBTQ+ au Japon ? Le sujet de l’article n’est pas le BL, donc je ne vais pas m’étaler, mais j’aimerais vous rediriger vers une lecture intéressante.
C’est un article Harada Akemi pour le site withnews.jp, traduit en anglais par Takurei’s Room (qui est d’ailleurs un super site si vous vous intéressez à la situation LGBTQ+ au Japon).
Je vous laisse lire, mais en gros:
– je ne vous apprends rien mais chaque individu est différent: ainsi, même si des hommes gays n’aiment pas le BL, trouvent ça irréaliste et n’apprécient pas que des filles se forgent une image de « l’homme gay idéal » qui na pas lieu d’être, certains n’ont aucun souci avec les « fujoshi », voire, lisent du BL
– pour Susumu Ryuu (éditeur-en-chef du magazine gay Barazoku), il y a deux types de « fujoshi »: certaines ne savent pas différencier la réalité de la fiction, et d’autres ont un peu plus de considération pour les hommes gays et sont soucieuses de les blesser avec leurs fantasmes
– certaines hommes témoignent du harcèlement de la part de « filles pourries » auquel ils ont fait face, et c’est exactement mon problème avec les « fans de yaoi ». Certaines vont trop loin, confondent BL et réalité, et vont manquer de respect à des vraies personnes. Quelqu’un raconte qu’une femme qu’il ne connaissait ni d’Adam ni d’Eve lui a demandé comment c’était au lit avec un homme, un autre homme a eu affaire à une auto-proclamé fan de BL qui avait « toujours rêvé de rencontrer un homo »,…
– mais Mizoguchi Akiko, maîtresse de conférence dans une école de droit, pensent que le BL peut profiter aux hommes gays dans le sens où lire des histoires à leur sujet peut aider les filles à « compatir » avec eux en s’imaginant à leur place…
Voilà pour vous donner une idée. Dans cet article, on ne parle pas de BL, mais c’est définitivement lié puisque les anime pour fujoshi jouent souvent sur les sous-entendus homoérotiques, et ont un public amateur de BL. Même quand un anime n’est pas classé « yaoi », la fanbase autour ne perd jamais de temps pour s’en imaginer. Donc quelque part, ça s’applique un peu à notre sujet. Franchement, je ne pense pas que c’est ce dont la cause LGBTQ+ a besoin. Je ne vis pas au Japon donc je ne suis pas bien placée pour en parler, mais il y a peu de représentation positive des personnes LGBTQ+ dans les médias, et même en dehors de ça, la communauté doit se battre pour ses droits, et pour être acceptée. C’est encore un peu taboo, tout ça.
Alors plus que des bande dessinés pornographiques où des hommes couchent ensemble, plus que des anime avec des romances gays, peut-être que ce qui rend le plus service à la cause, c’est d’être mise en avant dans des médias tout publics, avec des personnages LGBTQ+ comme dans Last Friends, des célébrités ouvertement LGBTQ+ comme AyaBambi ou Ataru Nakamura, des events comme la Rainbow Parade,…
Encore une fois: je suis pas japonaise, donc je peux pas m’étaler sur le sujet, mais j’imagine que c’est plus utile que le… boys love.
Tout ça pour en venir au fait que… je pense que c’est attribuer trop de mérite à Yuri!!! on Ice que de dire qu’il contribue à quoi que ce soit pour la cause LGBTQ+ au Japon. Cela dit, je veux croire que c’est un pas en avant, et peut-être que ça encouragera plus de studios à faire des anime avec des protagonistes non-hétéros, de préférence des anime ne se cantonnant pas aux « fujo ». En attendant, c’est pas une avancée aussi exceptionnelle qu’on aimerait le penser.
Sur ce, je pense avoir expliquer et développer ce que je voulais, alors une nouvelle fois, la parole est à vous ! Dites-moi ce que vous pensez de l’officialisation du couple Victuri, et du fait que l’anime vise un public féminin, et discutons-en dans les commentaires !