Publié dans Chronique

90 minutes dans un butler café.

Dire qu’il y a une semaine jour pour jour, j’étais à l’une des tables du Swallowtail… Vous lisez bien. Liloun et moi avons rendu un grand service à la science en allant dans un « butler café ». Et pas n’importe lequel ! Le Swallowtail a plutôt bonne réputation… Situé au sous-sol d’un bâtiment d’Ikebukuro, aux abords d’otome road, on y entre seulement sur réservation.

On va pas se mentir, j’étais un peu sceptique… Vous vous souvenez peut-être de mon expérience dans un maid café en 2013… j’en avais pas exactement gardé le meilleur souvenir, et je redoutais le même malaise avec l’équivalent masculin.

A l’entrée, on est accueillies par un premier butler, très classe, qui nous demande à quel nom on a réservé et… si on préfère se faire appeler « oku-sama » ou « ojou-sama ». Ca annonçait tout de suite la couleur. Je commence à réaliser où je suis et dans quoi je me suis lancée et je suis dans tous mes états !!! La porte s’ouvre, et deux butlers nous souhaitent la bienvenue, à nous, les ojou-sama. L’un nous débarrasse et l’autre nous conduit à notre table. On est bien sûr traitées comme les princesses que nous sommes : on nous tire la chaise, nous dépose une serviette sur les genoux, tout le baratin.

Là, je regarde autour de moi, et je me rends compte que ça ne rigole pas au Swallowtail. Mes préjugés et moi, on s’attendait à un décor cheap et à un jeu d’acteur gênant, mais il s’avère que l’endroit est très classe, et que le personnel est à fond dans son rôle. On y croit et on se prend vite au jeu.

img_7334
Les photos sont interdites à l’intérieur de l’établissement donc voici un aperçu du café trouvé sur le twitter de Swallowtail.

Même la clientèle est chic et distinguée ! Comme on pouvait s’y attendre, elle était exclusivement féminine. Quelques femmes âgées. Beaucoup de jeunes filles seules (il y a d’ailleurs un certain nombre de tables individuelles ; c’est visiblement courant de venir dans ce genre d’endroits seule. Et chacune d’entre elles était sur son 31, dans le thème bien sûr, avec de belles robes d’inspiration victorienne. On est loin du client solitaire creepy du maid café; l’atmosphère est totalement différente.

Nous, en revanche, on n’était pas exactement habillées pour l’occasion, et laissez-moi vous dire qu’il n’y avait rien de plus cocasse que de voir ces élégants butlers avec mon sac en forme de requin entre les mains. A la fin, on me l’a carrément enfilé, ohlala, j’ai pris sur moi pour ne pas exploser de rire.

img_7427
Le sac en question pour que vous vous imaginiez mieux la scène.

Un nouveau butler arrive rapidement pour nous tendre des menus. Jusque là, on nous faisait de longs speechs en japonais dont on comprenait un mot sur cinq parce que, même si on se débrouillait toutes les deux en japonais, on était là dans un établissement où le niveau de langue était beaucoup trop soutenu (c’était la première fois que j’entendais le pronom « watakushi » en vrai par exemple ! pour vous dire à quel point la situation était formelle), mais là, le butler s’est efforcé de nous expliquer toute la carte en anglais !

On était là à l’heure du thé, donc on avait le choix entre deux desserts de saison, deux types d’afternoon teas, et une sélection de repas légers. On a toutes les deux opté pour le dessert « Selva » : une gelée de mombins et d’oranges, accompagnée d’une meringue au citron, d’un biscuit, de chantilly, et de chocolat blanc, un sorbet aux fruits rouges et une gelée de fruits, et pour décorer, un coulis mangue-banane et une mousse de mojito. Enfin, une verrine cacao avec de gros morceaux de gelée aux fruits, une tuile au chocolat, et de la menthe.

img_7333
Image provenant du site officiel de Swallowtail.

Le tout pour 3 500 yen (environ 27€), thé compris. C’est bien simple, tout était entre 3 000 et 4 000 yen (et à l’heure du repas, on monte à 5 000 yen). Je ne savais pas trop à quoi m’attendre au niveau des prix, mais dès que j’ai posé le pieds dans la salle principale, j’ai su que ça allait tourner autour des 30€; mais laissez-moi vous dire que ça les valait. C’était délicieux ! J’aime la gelée en petites doses donc j’avoue que vers la fin, j’ai saturé, mais c’était vraiment très bon, et je n’en ai finalement pas laissé une miette.

img_7335
Aussi piquée sur le twitter.

Le thé aussi était fort bon. J’avais « le thé du mois », un thé à la pêche : excellent. Et surtout, hors de question de s’en verser soi-même : dès que notre tasse était vite, notre butler s’empressait de venir nous resservir.

De toute façon, c’est bien simple, tu ne fais rien seule dans ce café : pour le moindre truc, tu fais retentir une petite clochette, et un butler accourt pour te servir.

Et ça, même pour aller aux toilettes. Comme aucune de nous n’a même envisagé de se servir de la fameuse clochette, c’est notre butler qui a fini par nous demander si l’une de nous avait besoin de s’y faire accompagner. De ma place, j’avais vue sur la porte qui menait aux toilettes, et quand une cliente y est allée, le butler est entrée avec elle ?! Même si j’avais eu besoin d’aller aux toilettes, j’aurais pas pu… qui sait à quel point ils t’assistent dans le processus… non merci…

Le café est toujours plein et les réservations s’enchaînent, donc on a très précisément 90 minutes pour en profiter. On nous donne l’addition 20 minutes avant. Avant qu’on parte, le butler qui nous a servi nous a un peu fait la conversation : il nous a demandé depuis combien de temps on était au Japon, d’où on venait,… c’est là qu’on a appris qu’il avait fait une formation de sommelier à Lyon ?! et il nous a sorti un merveilleux « Comment vous appelez-vous ? ».

J’ai regretté de ne pas mieux maîtriser le japonais, parce que j’imagine bien que l’expérience est encore plus sympathique quand on peut tenir une vraie conversation. Quoique je pense qu’on s’est épargnée bien de la gêne en ne comprenant pas tous les discours à base de « ojou-sama »… trop intense… Après qu’on ait récupéré nos affaires, et qu’on m’ait passé les bretelles de mon fameux sac requin, deux butlers nous ont hurlé de prendre soin de nous et de revenir prochainement. Alors à ce prix-là, je ne reviendrais pas tous les jours, mais j’ai constaté qu’ils avaient pas mal d’habituées. On a entendu une fille appeler le butler posté à l’entrée par son prénom ! en lui disant « tadaima » ! Et à l’intérieur, plusieurs filles faisaient la conversation aux majordomes comme s’ils étaient amis de longue date… on a d’ailleurs reçu une carte de fidélité, donc peut-être qu’un jour, on sera l’une d’elles…

Juste en face, la boutique de souvenirs de Swallowtail, où l’on peut notamment acheter du thé et des CD. Parce qu’ils en chantent aussi ! Beaucoup, vu comment le rayon était fourni.

Préparez-vous, c’est vraiment un bon son. Décidément, ces butlers… ils ont tous les talents, ils ne cessent de surprendre.

Bilan de notre passage au butler café ? Une agréable surprise, une expérience insolite, Sebastian n’a qu’à bien se tenir !

 Japon, 〒170-0013 Tokyo, Toshima, Higashiikebukuro, 3 Chome−12−12 正和ビル